dimanche 20 novembre 2011

20e WPC - Rien n'est trop difficile pour la jeunesse


Suivant le 6e WSC, le 20e WPC constituait un événement particulier puisqu'il était rien moins que le troisième évènement du genre organisé par la Hongrie. Des surprises étaient à attendre ; des surprises il y eut.
À l'opposé du WSC, je n'étais là qu'en touriste - membre de l'équipe B et sans ambition particulière - mais en touriste passionné et décidé à profiter du spectacle. Après une journée de "repos" consacrée notamment à visiter les environs ainsi qu'à la remise des prix du WSC (dans une grotte - avais-je parlé de surprises ?), c'est le jeudi matin que débutaient les 15 épreuves qui allaient mener à l'inscription d'un nouveau nom au palmarès du WPC.

Épreuve 1 - In memoriam (30')
Cette première épreuve est dédiée à plusieurs personnalités du monde des jeux de logique, ayant notamment contribué aux précédents championnats du monde en Hongrie (en 2005), et décédées depuis. 14 grilles de difficulté raisonnable, mais déjà quelques beaux morceaux. J'attaque assez tranquillement, comme beaucoup de monde : 170/400 ; seul Ulrich Voigt dépasse les 300.

Épreuve 2 - Assorted puzzles (60')
36 grilles, pas moins ! Une alternance de grands classiques (Battleships, LITS, Cave), de variations (Skyscrapers varia, Hexa loop) et de jeux moins courants, à l'approche parfois délicate (Rectangles). Je me concentre sur ce que je connais mais la quantité de grilles est vraiment trop importante et je n'ai même pas le temps de regarder certaines pages. 350/885, et maximum de 630 pour Palmer Mebane. De toute évidence, la longueur des épreuves a été passablement sous-estimée et il va donc falloir faire des choix, y compris pour les meilleurs.

Épreuve 3 - Cows (50')
10 minutes de moins, mais quatre fois moins de grilles. Épreuve sur le thème des vaches, donc... Le puzzle de base, simplement dénommé "Classic Cows", n'est en fait rien d'autre qu'un Star Battle. Les jeux suivants s'en inspirent plus ou moins. Les grilles sont belles dans l'ensemble, mais un premier problème apparaît avec une grille fausse (Knights). Résultat assez moyen pour ma part étant donné le temps perdu à recommencer celle-ci plusieurs fois. 185/420 ; maximum de 390 pour Peter Hudak.

Je ne me rends compte qu'aujourd'hui, mais toutes proportions gardées j'avais relativement bien débuté ce championnat puisque à l'issue de l'épreuve 3 j'étais le joueur français le mieux classé. Les choses se sont un peu gâtées par la suite.

Épreuve 4 - Borderless (30')
L'épreuve 4 est probablement la plus redoutée de ce WPC (avec peut-être l'épreuve 15, par équipes). 9 grilles sont proposées, de différents types (Skyscrapers, Easy as ABCD, Snake...) et de taille variant entre 8x8 et 25x25. La tâche consiste, pour chacune de ces grilles, à en isoler une portion, laquelle doit former une grille valide compte tenu des indices. Ainsi, dans le cas du Skyscrapers, il s'agit de repérer une zone carrée de 5x5 cases au sein d'une grille de 12x12 - et de la résoudre, bien entendu. Je viens à bout de deux grilles dans le délai, soit un total de 100/430 - je n'espérais pas mieux et avais surtout à coeur d'échapper au zéro, vite récolté sur une épreuve de ce genre. 295 pour Palmer.

Épreuve 5 - Evergreens (70')
18 grilles, uniquement des jeux communs ou du moins connus... La traditionnelle épreuve sans surprise faisant la part belle aux joueurs bien entraînés.
Or, étonnement général à la vue des grilles : toutes ou presque sont d'une conception à ce point originale que nos réflexes en sont brouillés et que l'approche traditionnelle n'a plus la moindre chance de mener à quelque chose. Nous avons entre autres affaire à : un Arrows de taille 2x2, entouré de 8 cases à remplir ; un Heyawake (Heyawacky, plutôt) constitué de 4 zones aux indices de 8, 9, 11 et 13 ; un Mastermind constitué uniquement de points noirs et blancs ; un Skyscrapers 9x9 contenant les chiffres de 1 à... 2 ; un Slitherlink ne contenant que des 0 ; deux Scrabble dans lesquels ne placer que des O ; et enfin un Magic snail en forme de... devinez.
Plus par stress qu'autre chose, je sèche sur de nombreuses grilles et en zappe d'autres qui, la surprise passée, étaient en réalité tout à fait jouables. 245/750, 645 pour Thomas Snyder et le début de la dégringolade pour moi. L'épreuve était en tout cas d'une originalité remarquable et la construction de la plupart des grilles irréprochable. Un des moments forts de ce championnat.

Épreuve 6 - Board games (équipes - 40')
Pour cette première épreuve par équipes, nous nous voyons remettre huit jeux de plateaux : Tangram, Abalone, etc. À chaque jeu est associé un puzzle, à résoudre à l'aide des pièces du jeu en question. Un concept original et fort bien exploité (et à même de contenter les sponsors, je suppose). La difficulté des jeux est assez variée : le Rummikub tombe en quelques instants, le Digit et le Pentago Black and White ne résistent pas longtemps à Frédérique ; le Tangram Battleships et le Terc semblent coriace et nous les laissons finalement de côté ; Finalement nous consacrons la plus grosse partie de notre temps à l'Abalone S-Policy, dont nous venons finalement à bout, et au Makao mio Skyscrapers, sur lequel quelques minutes nous auront manqué (probablement de la faute d'une erreur de ma part). Les 40 minutes se sont écoulées extrèmement vite et nous n'avons pas abordé le dernier jeu (Callisto Loop) dont j'avais pourtant prévu de m'occuper. Score de l'équipe : 400/800, un résultat honorable, quoiqu'à des lieues de l'équipe USA-A (1160).

Épreuve 7 - Naval puzzles (équipes - 60')
Suivant immédiatement la première, deuxième épeuve par équipes. Un seul jeu cette fois, mais quel jeu ! Un mélange de Snake, Islands, Anglers et Lighthouses au sein d'une grille géante 30x30. Nous allons être quatre à plancher dessus simultanément ; ou plutôt trois, car à tour de rôle, nous allons avoir la possibilité de nous isoler du reste de l'équipe afin de résoudre une grille individuelle, laquelle est susceptible de nous procurer des indices pour la grille commune. La stratégie est de la partie : vaut-il mieux conserver toutes nos forces ou partir à la pêche aux indices, au risque que le joueur désigné se retrouve dans une impasse faute de venir à bout de sa grille ? Nous optons pour la seconde solution, sachant qu'il est possible à tout moment pour le joueur isolé d'abandonner sa grille en cas de problème et de rejoindre l'équipe. Nous avançons tranquillement mais Frédérique, puis moi, qui sommes les deux premiers à partir à la pêche, sommes confrontés à des grilles individuelles à la difficulté assez élevée et mettons un certain temps à rapporter nos indices. Yannick puis Sylvain font heureusement plus vite, et nous progressons par ailleurs relativement bien sur la grille. Allemagne-A et Japon-A en finissent, mais juste dans les temps. Nous nous en tirons avec 586/1600, un score correct.

Épreuve 8 - Screentest (30')
Les screentests sont une constante des WPC. Ils consistent en une série d'exercices s'enchaînant sur un écran géant, à résoudre de tête. Le screentest typique comprend des exercices de type labyrinthe, calcul mental, dénombrement...
Nous n'avons certes pas eu affaire à un screentest typique. Les jeux en eux-mêmes étaient des standards. Mais de même que lors de l'épreuve 5, les organisateurs se sont fendus d'une présentation à même de déstabiliser les joueurs les mieux rodés. Le puzzle 2 était ainsi un simple labyrinthe, et même un labyrinthe des plus simples. À ceci près qu'il était en rotation. Le 10 nous demandait de compter une douzaine de disques noirs, agencés en cercle, à la façon des étoiles du drapeau européen. Tous de même taille, bien distincts, et en nombre très raisonnable donc. Mais allez déterminer si vous avez devant les yeux 12 disques ou 13, lorsque, là encore, ils sont animés d'un mouvement de rotation... J'ai parié 12 ; ils étaient 13.
Comme toujours lorsque je dispose d'un délai court et précis pour réaliser un exercice, l'essentiel de mon attention s'est porté sur la barre qui symbolisait le temps restant. Je passe ainsi à côté de la plupart des jeux et hérite d'un score lamentable : 75/200. Annick Weyzig et Jason Zuffranieri frôlent le score parfait avec 185.

Épreuve 9 - Sprint (30')
Peu de points à engranger, mais une épreuve supposée me convenir étant donné ma bonne vitesse globale. 4 grilles de 5 types, dont 4 classiques (Numberlink, Fragmented loop, Shikaku et Yajilin) et 1 moins courant : Ariadne's thread. Je viens à bout de 15 grilles en un temps très raisonnable, puis bute irrémédiablement sur le dernier Numberlink et sur les Ariadne's thread, jeu que je n'avais jamais essayé et qui de toute évidence ne me convient pas le moins du monde. 220/300 et beaucoup de temps gâché ; 375 pour Palmer.

Épreuve 10 - Divide and conquer (30')
Originale, cette épreuve est consacrée à un seul type de jeu ; le principe en lui-même est assez discutable car il fait peser beaucoup sur un unique exercice, mais force est de constater que l'exploitation était efficace. Les auteurs (Zoltan Horvath pour l'essentiel) ont réussi, à partir d'une règle fort peu contraignante, à dessiner de très belles grilles à la résolution des plus inhabituelles. Je m'en tire de façon satisfaisante avec 160/400 (inatteignables). Tatsuya Yamamoto pointe à 310.

Épreuve 11 - Magic 11 (44')
Supposée démarrer à 11:11:11 le 11 novembre (quelques minutes plus tard en réalité, les aleas de l'organisation...), cette épreuve est articulée autour d'un nombre que je vous laisse deviner. 11 grilles, là encore de belle facture, et quelques beaux morceaux. Je sèche lamentablement sur certaines des plus côtées et dois me rabattre sur les petites ; malheureusement l'une d'entre elles s'avère avoir plusieurs solutions et je lui consacre donc plusieurs minutes en pure perte. 110/550, une opération des plus mauvaises - proportionnellement parlant, mon épreuve la plus faible. Ulrich atteint les 560.

Épreuve 12 - Hungaricum (80')
La partie 12 est la plus longue et la plus chère du championnat, WSC et WPC confondus : 80 minutes pour 1115 points théoriques et 42 grilles. Certes, personne n'envisage que quelqu'un va résoudre l'ensemble des grilles ; de fait, on en sera assez loin. Les jeux ne sont pas inédits mais tout de même peu répandus et personne ne les maîtrise donc à la perfection. Le choix est si vaste que je suis encore une fois obligé de laisser de côté plusieurs pages, dont certaines contiennent pourtant des jeux sur lesquels je pense me défendre. Je pioche à droite et à gauche de façon assez maladroite et engrange 280 points sans gloire. Ulrich est premier avec 870.

Épreuve 13 - Innovatives (60')
27 grilles. Nous connaissons le truc : faire le bon choix. Je me concentre sur des jeux relativement longs, mais que je sais maîtriser : Sudoku snail, False skyscrapers, Pentopia... Tactique efficace : je récolte 340 points sur 940, un score nettement meilleur que celui de la plupart des autres joueurs de mon rang (très exactement le contraire du round précédent). Maximum 520 pour Nikola Zivanovic.

Épreuve 14 - Best of (60')
Nous n'avions rien vu. Cette partie "bonus" est composée des grilles n'ayant pas été retenues pour les épreuves précédentes. Plutôt que de gâcher, les organisateurs les ont réunies en un livret de 21 pages constituant le dernier round individuel. 60 minutes. 77 grilles. 10 points par grille, indépendamment de leur difficulté (peu élevée dans l'ensemble, mais variable).
Et c'est parti pour un sprint d'une heure ; les meilleurs enchaînent les grilles à la vitesse de près d'une par minute ; Ulrich en termine avec 600 points. Je fais moitié moins.

Fin de la deuxième journée et des épreuves individuelles, hors play-offs. L'état général au sortir de cette épreuve peut probablement se résumer en un mot : repu.

Enfin, samedi matin, dernière épreuve par équipes. Pas des plus simples, qui plus est.

Épreuve 15 - Wrong puzzles ! (équipes - 60')
8 grilles... fausses. À ces grilles sont associés 8 carrés de papier de taille 4x4 comportant des indices chiffrés pouvant correspondre à n'importe laquelle des grilles précédentes. À nous la tâche de relier chaque carré "correcteur" à sa grille, de le placer au bon endroit et de résoudre la grille valide ainsi obtenue. Difficile, mais passionnant. Nous entamons d'emblée par le Product skyscrapers car il est le seul à posséder des indices extérieux, c'est-à-dire forcément justes. Yannick, Sylvain et Frédérique joignent leurs forces pendant que j'entame le Arrows. J'y avance mais me retrouve bloqué ; j'aide mes coéquipier(e)s à en finir avec le Skyscrapers puis Frédérique et moi nous chargeons du Minesweeper Pento ; malgré une erreur, nous en venons également à bout. Le temps nous manquera pour en faire plus, mais nous entamions l'épreuve sans grande confiance et nous en sortons finalement avec deux grilles correctes : par, dirons-nous.

Enfin derechef, c'est la finale. Les 10 premiers ne sont pas franchement des inconnus, et le top 3 est celui que je (et de nombreux autres sans doute) prophétisais : Ulrich Voigt, Palmer Mebane, Thomas Snyder. Le complètent Hideaki Jo, Bram de Laat, Peter Hudak, Nikola Zivanovic, Roland Voigt, Wei-Hwa Huang et l'invité surprise de l'année, Neil Zussman du Royaume-Uni. À noter que l'allemand Michael Ley est 7e à l'issue des épreuves... mais sa présence en tant que joueur non-officiel le prive de finale. Il aura toutefois droit à un prix de consolation judicieusement choisi - comprenez un tonneau de bière.
Le principe des play-offs est le même que pour le sudoku, à ceci près que les grilles seront de 9 types différents. Ulrich démarre le premier, suivi après un peu plus de deux minutes par Palmer puis par Thomas, et ainsi de suite.
Ulrich part à son rythme habituel... soutenu. Il avance avec régularité et sans sembler rencontrer de réel problème jusqu'à la 8e grille ; là, alors que Palmer l'avait jusqu'ici suivi de près mais sans parvenir à recoller, ce premier bute sur un Divide and Conquer qui s'avère retors - nous avions pu constater sur l'épreuve 10 qu'il était possible de créer des grilles passablement résistantes à partir de cette règle anodine. Palmer prend place à son tour à la 8e table alors qu'Ulrich peine toujours ; et pour le plus grand plaisir d'une audience toujours avide de coups de théâtre, il casse la grille alors que le multiple champion du monde semble ne jamais devoir en voir le bout. La dernière grille est un Password path ; difficile d'après le compte-rendu de Palmer, qui résout pourtant cet ultime puzzle en un souffle, Ulrich toujours luttant contre sa bête noire. Thomas Snyder est entre temps passé par là, et a à son tour résolu la grille 8 et entamé la 9. Mais dans un ultime sursaut, Ulrich casse finalement le Divide and conquer et avale le Password, privant les États-Unis d'un doublé or/argent. Thomas termine troisième devant son autre compatriote Wei-Hwa Huang, suivi de Hideaki Jo qui cumule donc les places de 4e au WSC et 5e au WPC.
Il était attendu, et il n'a pas déçu : Palmer Mebane remporte le WPC à sa deuxième participation, après une progression incomparable au cours de l'année 2011.

J'en termine paisiblement en 52e position ("non-officielle" puisque membre de l'équipe B nationale). Pas de quoi pavoiser mais je n'étais certes pas là pour faire du chiffre ; bien plutôt afin de goûter l'expérience. Le tournoi s'est avéré passionnant, d'une grande richesse. Toutes mes félicitations vont à l'équipe d'auteurs qui ont accompli un beau travail, et même proprement fabuleux sur certaines épreuves ; enfin, chapeau bas à toutes les personnes ayant assumé les tâches ingrates de distribution/ramassage des épreuves, correction et autres.

Fin d'une semaine intense et exaltante ; l'attente va être longue jusqu'aux prochaines qualifications, et plus encore jusqu'aux championnats. J'espère être à nouveau présent aux deux l'an prochain - l'avenir le dira. D'ici là, si vous avez l'intention de vous faire une place dans l'une ou l'autre équipe de France, je vous engage à ne pas perdre de temps et à entamer l'entraînement dès aujourd'hui ; nul ne niera que c'est un travail de longue haleine, et je peux maintenant certifier que - si vous me passez l'expression - le jeu en vaut la chandelle. Un message suivra sur le sujet.

Oh - et merci si vous avez eu le courage de tout lire. Je pensais vraiment faire plus court que pour le WSC, mais quand l'enthousiasme est là...

mardi 15 novembre 2011

6e WSC - C'est dans les vieux pots que l'on fait les meilleures soupes


Ainsi Thomas Snyder s'empare d'un troisième titre de champion du monde de sudoku, après avoir dominé aussi bien la finale que les épreuves préliminaires. Compte-rendu du 6e Championnat du Monde de Sudoku qui s'est tenu dans la ville hongroise de Eger, les 7 et 8 novembre :

Dimanche, arrivée à l'aéroport de Budapest sans problème, où nous sommes accueillis puis conduits à Eger (près de deux heures de route) après avoir récupéré quelques autres participants. Chambres - doubles - petites mais avec salle de bain indépendante et balcon, ainsi qu'un accès Internet et une télévision dont j'aurai actionné l'interrupteur exactement une fois, afin de l'éteindre après l'avoir allumée par inadvertance. Je retrouve quelques têtes connues et en découvre d'autres, et après la cérémonie d'ouverture et la séance de questions/réponses vient rapidement l'heure de se coucher afin d'être en bonne forme pour le premier jour de compétition.

Lundi, 10h40, début des épreuves ; en avant pour 48h de résolution acharnée.

Épreuve 1 : Wrong puzzles ? (20')
Parlons franc : difficile pour les organisateurs de débuter plus mal la compétition, avec une épreuve n'ayant rien à voir, de près comme de loin, avec la résolution d'un sudoku. 60 grilles nous sont données, de taille variant entre 6x6 et 12x12, et toutes étant déjà complétées ; notre tâche s'avérant de déterminer pour chacune si la solution est valide ou non. Peu motivé et, il faut le dire, peu organisé, je viens à bout de 37 grilles dans le délai – il s'avèrera plus tard que j'ai commis 3 erreurs - pour un score total de 86 points me plaçant d'emblée en queue de peloton, du moins parmi les prétendants à une bonne place.

Épreuve 2 : Sudoku pieces (30')
Il est cette fois question de résoudre une grille – mais une seule, sans papier ni crayon, avec pour support une grille en papier épais de taille 50x50cm et pour outils des carrés de carton comportant chacun une photographie différente parmi neuf, à savoir des monuments de Budapest. En dehors de cela, la règle de la grille est la suivante : chacun des indices donnés est faux, mais doit impérativement être présent dans une des cases adjacentes à la case en question. Ainsi, si l'indice présent en L1C1 est, mettons, un pont, un pont doit alors se trouver en L1C2 ou L2C1, sauf si l'une de ces cases contient également un pont pour indice.
Là où le bât blesse, c'est que les carrés de carton, une fois placés sur la grille, deviennent quasiment indiscernables des indices donnés, et masquent du même coup l'indice sur lequel ils sont placés. La résolution de la grille en est rendue extrêmement malaisée et désagréable. Ne trouvant aucun moyen de contourner efficacement ces problèmes et me laissant gagner par le stress, j'enchaîne les erreurs durant une demi-heure et termine l'épreuve en sachant que j'hériterai d'un zéro. Le profil d'une finale manquée à cause de ces deux épreuves passablement ridicules se dessine déjà et j'ai un peu de mal à conserver la bonne volonté qui m'animait en arrivant.

Repas léger, puis reprise des hostilités avec – enfin – du sudoku !

Épreuve 3 : Easy classics (45')
Première constatation : les organisateurs hongrois sont fâchés avec l'anglais, au vu de leur définition de « easy ». 6 grilles 6x6 et 16 9x9 à résoudre en 45 minutes : le délai serait exagéré pour des grilles véritablement faciles ; il s'avèrera tout juste suffisant avec 3 personnes finissant l'épreuve dans les temps. Suite à quelques erreurs, je fais l'impasse sur une grille et termine avec 555 points sur 580, en 5e position.

Épreuve 4 : Halved squares (40')
Une variante de conception hongroise, proche du sudoku irrégulier/chaosudoku. Je pars confiant sur cette épreuve, m'étant senti à l'aise sur la poignée de grilles que j'avais pu faire auparavant (essentiellement celles des qualifications hongroises). Je déchante rapidement après avoir coincé sur la première grille à 50 points (loin d'être la plus difficile a priori) et, quitte à peiner, me lance sur les deux plus grosses (55 et 80). Celle à 80 points tombe sans difficulté, mais une erreur se fait jour à la fin de la 55. Impossible de corriger et compte tenu du temps qu'elle m'a demandé, je préfère revenir sur les grilles à 50 n°2 et 3. À la fin, 265 points sur 370, bien loin derrière les 425 de Thomas Snyder et les 300+ de nombreux autres joueurs. En refaisant les grilles plus tard, je m'apercevrai que l'erreur sur la 55 n'était rien de plus qu'une minuscule confusion en fin de grille, que j'aurais pu rectifier en quelques secondes. Sur la 50 n°1, un placement simple m'avait échappé en dernière colonne... Contrairement à ce que j'ai pensé sur l'instant, les 370 points étaient bien à ma portée ; le score de Thomas n'en demeurant pas moins impressionnant.

Épreuve 5 : Central clues (40')
Première épreuve de variantes diverses. 40 minutes pour 11 grilles ; nous nous attendons à une difficulté moyenne très raisonnable, mais les grilles s'avèrent un cran au-dessus de nos expectations. En réalité, examinées à tête reposée, elle sont effectivement très abordables et chacune dispose d'un talon d'Achille plus ou moins évident mais sur le coup bien peu m'auront sauté aux yeux. Je coince notamment sur l'enfantine Primes in the center : il faudra que, après l'épreuve, l'on me mette sous les yeux que, du fait que les « zones premières » étaient agencées sous forme de croix, quatre nombres premiers d'un chiffre apparaissaient ; la seule « difficulté » restant étant alors de déterminer qui de 785 ou de 587 est premier... 285 points sur 480, un assez piètre résultat. Kota Morinishi est le seul à terminer, mais tout juste dans les clous.

Épreuve 6 : Circle sudoku (équipes - 40')
Cette première épreuve par équipes consiste en 8 grilles réparties en cercle autour de plusieurs roues dont la fonction est de permettre le transfert de chiffres d'une grille à l'autre. 4 classiques, 4 variantes. L'équipe progresse bien et résout 5 des grilles, mais une minute nous manque pour finir la 6e... et nous laissons deux cases vides sur la 7e. 300 points de perdus, qui auraient pu nous rapprocher du podium final. L'épreuve en elle-même était fort bien conçue, les transferts judicieusement disposés et la difficulté globale parfaitement évaluée. Une réussite.

Épreuve 7 : Vasarely sudoku (équipes – 40')
4 grilles, mais surtout 32 pièces de papier constitués chacun de 9 cases et comportant un ou plusieurs chiffres ; but du jeu : faire correspondre 8 des morceaux à chaque grille, puis résoudre celles-ci. Notre progression est assez lente par manque d'organisation, mais nous finissons par résoudre trois des grilles. La quatrième devrait être un jeu d'enfant, mais notre défaut d'organisation se révèle malheureusement fatal : nous nous retrouvons devant la dernière grille avec dix pièces au lieu de huit, dont deux ont donc manifestement déjà utilisées pour résoudre une autre grille ; de surcroît, il s'avère que, ayant finalement éliminé deux pièces surnuméraires, les huit nous restant ne permettent pas de résoudre la grille. Le temps nous manquera pour passer en revue les 22 autres pièces afin de retrouver celles correspondant à celle-ci. Nous nous contentons de 900 points là où les équipes de notre niveau décrochent entre 300 et 1000 points de rab. Là encore, autant pour nous éloigner du podium...
Au-delà de notre score, l'épreuve manquait, je trouve, d'intérêt à côté de la 6e.

Épreuve 8 : Decorated sudoku (60')
Deuxième partie de variantes en vrac. Une surprise nous attend en découvrant les grilles : pour chacune des 5 variantes, deux grilles sont proposées : l'une d'entre elles contient uniquement des indices (la « décoration ») et l'autre, uniquement des chiffres. Bel effort de conception, même remarquable pour certaines grilles, induisant deux modes de résolution radicalement différents pour une même variante. J'en recommence malheureusement plusieurs et termine avec 395 sur 640. Jakub O. l'emporte avec 525.

Épreuve 9 : Sprint (30')
Deuxième partie « classique ». 18 grilles réparties entre sudokus classiques, irréguliers et diagonaux, de difficulté globalement facile. Là encore, quelques erreurs m'empêchent de compléter ce set qui me convenait pourtant bien : 340 sur 360, et le 4e score.

Épreuve 10 : Sudoku mix (70')
Troisième et dernière, et plus grosse, partie de variantes diverses. Initialement planifiée sur 60 minutes, finalement étendue à 70. 27 grilles de 15 types différents ! Le délai semble largement insuffisant : il s'avèrera effectivement l'être, malgré l'extension accordée. Thomas ne dépasse pas les 620 points, sur un maximum de 940. Mon score de 575 m'offre la 4e place. Même en laissant de côté les erreurs, les 940 étaient hors de portée ; l'erreur d'estimation (mais peut-être était-ce un choix délibéré) est regrettable car elle fait de l'épreuve une sorte de loterie : du fait du choix trop important de grilles, l'on est obligé de faire l'impasse sur certaines sans même avoir pu leur jeter un coup d'oeil.

Épreuve 11 : Not easy classics (45')
Curieuse épreuve en vérité. 4 grilles faciles à 15 points, dont la présence est passablement incongrue, puis les difficultés commencent... et les ennuis avec. La progression sur la 5e grille est assez facile et s'achève par un B.U.G : « not easy » mais raisonnable, et intéressant. À partir de la 6e grille en revanche, les choses se gâtent et nous avons droit à une alternance de grilles « humaines » (7, 8, 11 à l'extrême limite, et 14) et déraisonnables (6, 9, 10, 12 et 13), le tout ordonné visiblement sans le moindre rapport avec la difficulté réelle de la grille. Comme toujours en sortant de ce type d'épreuve, deux sentiments dominent : la frustration d'avoir passé trois quarts d'heure à résoudre des grilles sans éprouver de plaisir, et l'incompréhension de voir encore et toujours de telles épreuves avoir lieu. On ne peut enfin s'empêcher de se demander de quelle façon sont testées les grilles pour en arriver à placer une grille se résolvant à l'aide de doublets après une autre réclamant des forcing chains.
Quoi qu'il en soit, je m'en tire – comme prévu – assez mal, notamment parce que je commets l'erreur d'aborder les grilles dans ce que je pense être l'ordre normal de progression : en faisant ainsi je ne jette pas même un coup d'oeil à la dernière classique qui est, par comparaison avec certaines des grilles précédentes, d'une facilité déconcertante : 32 placements simples, puis une évidente boucle interdite ou un XY-Chain de 4 maillons en viennent à bout. Bilan : 300 points sur 590, pour un meilleur score de 425. Petite consolation toutefois : notre équipe s'en tire avec le meilleur score cumulé (non grâce à moi !).

Épreuve 12 : 3D sudoku (30')
La dernière épreuve individuelle consiste en un cube de papier de côté 4 , constitué de régions irrégulières, dont il est possible d'ôter deux sous-cubes de côté 2 et 3, le grand cube d'origine de même que les deux grands cubes tronqués obtenus par le retrait de l'un ou des deux sous-cubes possédant chacun une solution propre. Au-delà des quelques difficultés induites par le relief, la grille est abordable et après un début laborieux j'en viens à bout en un peu plus de 17' – nous serons nombreux à finir l'épreuve dans les temps. 200 points sur les 140 de base, contre 230 pour Jan Mrozowski.
Une épreuve de type manipulation certes, mais éminemment plus plaisante que l'épreuve n°2, et mon score n'a rien à voir là-dedans. Nous avions là affaire à un pur sudoku, qui aurait tout aussi bien pu nous être présenté en deux dimensions ; l'ajout de la profondeur ne faisait ici que procurer un certain plaisir tactile.

Le cube

Épreuve 13 : Weakest link (équipes - 60')
Comme son nom l'indique, l'épreuve se base sur le principe du maillon faible : tous les joueurs commencent ainsi l'épreuve à une table individuelle et doivent résoudre 4 grilles de type GT/Inégalité avant de pouvoir rejoindre la table de leur équipe afin de travailler aux « véritables » grilles. Celles-ci sont également des sudokus GT, mais liés deux à deux par des relations de type pair/impair et grand/petit : une case A, paire dans la première grille, sera forcément impaire dans la deuxième, et ainsi de suite. Le premier joueur arrivé se voit remettre la première grille, le deuxième la deuxième, etc. Ainsi, si l'un des joueurs ne vient pas à bout de ses 4 grilles individuelles, c'est un quart de l'épreuve qui ne parviendra jamais à la table commune.
Par chance notre équipe est constituée de joueurs/ses rapides et suffisamment polyvalents pour réduire à néant un tel risque. J'ai d'ailleurs assez confiance en nos chances de réaliser un bon score sur cette ultime épreuve. De fait, je parviens assez rapidement à bout de mes 4 grilles, pour ainsi dire dans la même seconde que mon bon ami Frédéric Stalder - l'occasion d'échanger quelques mots avec lui au grand dam des arbitres - et prenant place en premier à la table. Mes coéquipier(e)s me rejoignent après quelques minutes alors que j'ai déjà un peu avancé sur la première grille, et, procédant cette fois de façon exemplaire, nous bouclons les 4 l'une après l'autre, sans difficulté, en un peu plus de 40 minutes (ce délai comprenant la résolution préalable des grilles individuelles) ; nous terminons l'épreuve en 3e position derrière les écrasants tchèques, inaccessibles sur ce type de grilles, et l'équipe chinoise.

Ainsi prennent fin les épreuves de ce WSC. Suite à quelques contestations (grilles n'ayant pas été comptées, etc.), j'échoue en 11e position, soit très exactement aux portes de la finale, confirmant ainsi les craintes acquises dès le matin de la première journée de compétition. Mon sentiment d'ensemble est un peu mitigé, en raison principalement du fait que la finale m'échappe, non à cause de mes capacités insuffisantes en sudoku, mais bien plutôt du fait de deux épreuves dont la première était, tout simplement, tout sauf du sudoku, et la seconde une partie de roulette russe : pour peu que vous eussiez de la peine à distinguer les pièces, la progression était rendue extraordinairement ardue. D'autres que moi, et non des moindres, s'y sont fait prendre, à l'instar de Jakub Ondrousek (3 pts/180) ou de Ulrich Voigt (6pts/180), rien moins que septuple champion du monde de puzzles, dont on peut difficilement supposer qu'il a failli pour cause de niveau technique insuffisant. Comme je l'ai dit ailleurs, l'idée avait le mérite d'être originale, mais son exploitation se sera avérée désastreuse.
Notre équipe (France - A) s'empare de la 6e place malgré une gestion assez moyenne des épreuves par équipes. Je pense qu'il nous était possible de faire encore mieux, mais nous réalisons tout de même, pour autant que je sache, la meilleure performance française à un WSC.

Enfin, c'est l'heure de la finale (18h15 heure théorique, nettement plus tard en pratique). Les quatre noms que j'annonçais avant le début du championnat s'y retrouvent, aux côtés de six joueurs qui étaient tous également attendus : Kota Morinishi, Tiit Vunk, Florian Kirch, Jan Novotny, Nikola Zivanovic et Michael Ley. Le déroulement de la finale est des plus originaux : la salle est organisée en 9 rangées de tables, chacune correspondant à l'une des grilles. Les trois premières rangées comportent 10 tables, les trois suivantes 7 et les trois dernières 5. Ainsi, à l'issue de la troisième grille, seuls les 7 joueurs les plus rapides trouveront un siège ; les 3 derniers s'arrêteront là ; de même, à l'issue de la sixième grille, seuls les 5 meilleurs auront la chance de pouvoir se frotter aux 3 dernières grilles, qui les départageront donc. D'autre part, reprenant en cela l'excellent principe du WSC 2010, les joueurs ne démarreront pas simultanément mais en fonction de leur classement à l'issue des épreuves préliminaires. Thomas Snyder s'élance ainsi avec 3 minutes d'avance sur Jan Mrozowski, et ainsi de suite jusqu'à Jakub Ondrousek qui entamera la première grille exactement 10 minutes après Thomas.
Les grilles alternent entre classiques et variantes déjà rencontrées lors des épreuves : False clues, Even/odd regions, etc. D'emblée, Thomas part sur un très bon rythme alors que Jan semble désespérément coincé sur la seconde grille. Thomas ne sera jamais véritablement inquiété, mais derrière lui la lutte fera rage jusqu'au bout avec trois hommes se détachant clairement : Kota, Tiit et Hideaki, pourtant parti neuvième. À l'arrivée Thomas Snyder s'empare donc de son troisième titre, Kota Morinishi décroche une belle médaille d'argent et Tiit Vunk de bronze, et avec enthousiasme s'il vous plaît ! Hideaki échoue à la quatrième place suite à une finale particulièrement impressionnante.

Globalement, les organisateurs méritent de chaleureuses félicitations pour l'excellente qualité de la plupart des grilles, l'absence totale de grilles fausses ainsi qu'une tenue du tournoi des plus efficaces, avec pour principal bémol le très lent affichage des résultats. L'équipe de France quant à elle sort de ce championnat forte de sa meilleure performance, aussi bien en individuel que par équipes. L'expérience valait à n'en pas douter le détour, et mon seul souhait aujourd'hui est que le championnat 2012 s'avère aussi plaisant, ce qui constituera à n'en pas douter un véritable challenge pour la Croatie, pays hôte l'an prochain.

À suivre : le compte-rendu du 20e World Puzzle Championship.

jeudi 3 novembre 2011

Renban groups sudoku 1

Une méthode d'entraînement efficace à l'approche d'un tournoi est de créer quelques grilles ; la plupart des joueurs ayant franchi le cap de la création confirmeront que cela s'avère d'une grande utilité sur le plan technique. En particulier, se confronter à des variantes que l'on maîtrise mal permet de repérer nombre de subtilités qui nous échappaient jusqu'alors. La grille du jour ne s'intègre pas parfaitement au sujet car elle est d'un type que je maîtrise déjà raisonnablement bien, mais étant présente en deux exemplaires au WSC il m'a tout de même paru intéressant de lui consacrer un peu de temps.
Renban groups sudoku est une variante que l'on doit à Zafer Hüseyin Ergan.

Chaque ligne, colonne et région doit contenir les chiffres de 1 à 9. Une zone grisée doit contenir un groupe de chiffres distincts et consécutifs.
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Each row, column and region must contain the digits from 1 to 9. A grey area must contain a set of distinct consecutive digits.